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page
44
(
artabsolument
)
no 8 • printemps 2004
Né en 1939 àCourbevoie, vit et travaille àParis.
Sa nouvelle démarche artistique – des dra-
peaux tendus sur châssis – qui exclut toute
référence autobiographique, met paradoxa-
lement en perspective sa production du
passé, notamment ses autoportraits.
Cependant, entre les œuvres d’hier et
aujourd’hui, demeure son principe de neu-
tralité où les émotions et la violence sont à la
fois assumées et distanciées.
1.
Si je devais faire un bilan aujourd’hui, je
dirais que la première période, qui va de 1962
à 1998, correspond à une démarche autobio-
graphique. Les “psycho-objets” se sont ins-
crits dans ce travail d’introspection. Mais en
1998, à 55 ans, j’ai eu le sentiment d’avoir
épuisé le désir et le meilleur de ma recherche
intérieure. J’ai voulu rompre avec ma produc-
tion du passé pour reposer les questions de
l’art, pour retenter une “seconde vie”.
Quelques années auparavant, en 1993, j’avais
détruit ma maison en céramique. Cet acte
violent, qui participait de mon désir d’un
no
man’s land
, de revenir au degré zéro, allait
annoncer d’une certaine façon ma rupture de
1998. Dès lors, les questions de l’autoportrait
ou les signes autobiographiques n’avaient
plus de sens pour moi. Mon nouveau travail
sur les drapeaux – objets de représentation
très internationale – faisait le lien avec le
monde extérieur qui, par ailleurs, avait énor-
mément changé du fait de la mondialisation.
Le premier drapeau devant lequel je me suis
photographié est bien sûr français ; ce sont
les dernières “traces” autobiographiques,
une sorte d’”auto-identité” distanciée. Les
drapeaux chinois, cubain, israélien ou irakien
quittent le champ du politique pour acquérir
le statut d’œuvre d’art, par le simple fait que
je les ai choisis. Tendus sur un châssis, mis
sous tension, ils livrent au regard ce qu’ils
sont. Avec ce geste, ils deviennent des “objets
Raynaud” et je m’interdis toute intervention.
Le monde de l’art comme le public était désta-
bilisé ; certains se sont sentis trahis, tellement
attachés à mes signes artistiques tels quemes
pots de fleurs ou mes céramiques. Devant
cette incompréhension, parfois violente, j’ai
pensé à Matisse et à la fracture qu’il a dû res-
sentir dans le regard des autres avec ses
papiers découpés. L’inconfort ne me déplaît
pas à condition que l’art en sorte gagnant.
Note d’atelier
Jean-Pierre Raynaud
Jean-PierreRaynaud
Projet pour
la ville de Sète.
1991.
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