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page
12
(
artabsolument
)
no 1 • printemps 2002
Forum
Francois Bouillon, Liliane et Michel Durand-Dessert,
Michel Perrin, Pascal Amel
“Discussion autour de l’Art Primitif
et de l’Art Contemporain”
Un siècle après la “découverte” des arts dits primitifs ou premiers
par les artistes de la modernité occidentale, qu'en est-il aujourd’hui du
rapport art primitif/art contemporain?
(art absolument)
conscient que cette réflexion nécessite des points
de vue divers a organisé une rencontre entre LILIANE et MICHEL
DURAND DESSERT, qui sont à la fois galeristes d'art contemporain et
collectionneurs d'art primitif (cf. la belle exposition en juin dernier où
ils ont réuni des fétiches des Ejagham et des dessins de l'artiste Pino
Pascali) ; l'ethnologue MICHEL PERRIN, spécialiste du chamanisme et
des indiens Kuna de Panama (dont il a exposé les tissus -
les molas
- au
Musée Vasareli l'été dernier) ; l'artiste contemporain FRANÇOIS
BOUILLON, dont les propositions plastiques prennent souvent en
compte, de manière référentielle ou ludique, divers archétypes forma-
lisés par les cultures lointaines ; et l'écrivain PASCAL AMEL, qui est le
directeur de la rédaction de la revue
(art absolument)
et le fondateur
du
premier festival de la culture des Gnaoua
, à Essaouira, au Maroc.
Afin d’établir un cadre pour la discussion
(art absolument)
a préalablement envoyé ces quelques remarques aux différents
intervenants :
1. La ferveur manifestée par les artistes majeurs des avant-gardes
du début du XXe siècle (Brancusi, Picasso, les membres du
Blaue
Reiter
, les Surréalistes, Paul Klee...) pour les arts dits primitifs ou pre-
miers, semblent coïncider avec une revalorisation des esthétiques
jusque là marginalisées, comme par exemple les gravures populaires,
le monde paysan, l'art des enfants ou des malades mentaux? D'où pro-
vient, selon vous, ce besoin d'élargissement du cadre de l'art occiden-
tal - qu'il soit géographique ou interne à ce dernier ?
2. Dans nos sociétés, le triomphe de la
rationalité et de la technique a évacué en
grande partie la dimension du sacré -
qualifiée au mieux d'illusoire au pire
d'obscurantiste. L'attrait pour le primiti-
visme, qui semble être une constante du
XXe siècle, ne serait-il pas un retour du
refoulé des "valeurs spirituelles" comme,
par exemple, les œuvres de Brancusi ou
de Barnett Newmann en sont les évidents
témoignages? Depuis la seconde guerre
mondiale, d'autres artistes vous sem-
blent-ils suivre cette voie?
3. Nietzsche écrit que les artistes
sont les médecins de la civilisation ; cer-
tains artistes (Max Ernst ou Joseph
Beuys) se sont volontiers reconnus dans
la figure du chamane. L'art serait-il
davantage qu'on ne le pense en Occident
de l'ordre d'un remède, d'un "baume
pour les yeux et pour l'âme" qu'une
recherche esthétique ?
4. Quelles conditions doivent être
réunies pour qu'une œuvre locale pro-
duite dans un contexte donné - telle tribu
ou telle aire géographique - puisse
émouvoir n'importe quel spectateur, et
devienne en quelque sorte globale ?
5. La reconnaissance institutionnelle
par l'occident - ethnologique, artistique,
marchande, muséale, publique - des
œuvres des civilisations lointaines influe-
t-elle sur les artistes des pays concernés?