Art Asolument 81- Février 2018 - Aperçu - page 16

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Si la photographie se nourrit du réel et de sa
propre histoire comme un matériau qu’il nous
appartient d’apprivoiser, elle sait aussi les
détourner et les travestir pour créer des espaces
imaginaires faits de désirs, d’ici et maintenant.
Dans la photographie dite « plasticienne », la
quête est tout autant esthétique qu’identitaire.
Des gestes très conscients, interventionnistes,
créent les déca l ages et les broui l l ages
nécessaires à la cristallisation du visible.
Parmi les artistes photographes invités aux
Rencont res de Bamako cet te année , un
certain nombre pratiquent une photographie
« impure », hybride, dans laquelle les principes
de réalité ouvrent la voie à toutes sortes de
contournements salvateurs. Quatre d’entre
eux, dont les travaux sont présentés dans
di fférentes exposi t ions , ont en commun
de travailler ce que l’on pourrait appeler la
société civile. Leurs univers, aux tonalités très
distinctes, abordent des problématiques et
des situations spécifiques mais qui relèvent
toutes de mécanismes de tabou et de non-dit.
Leurs manipulations, exubérantes ou discrètes,
leur sens du montage, confèrent à l’image une
étrange épaisseur spéculaire. Athi-Patra Ruga,
Joana Choumali, Amalia Ramanankirahina
et Keyezua font surgir, en amont et en aval
du photographique, des mondes parallèles,
surréels. Parant et masquant les figures, ils
opèrent entre résistance et effacement. Ils
composent des images assez latentes pour
déjouer toute lecture déterministe, assez
spectrales pour transcender l’aliénation des
corps et des esprits.
PAR GÉRALDINE BLOCH
Se voir,
s’imaginer
Quatre photographes à Bamako
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