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page
50
(
artabsolument
)
no 15 • hiv er 2005/06
à en faire usage… Ces deux e xemples emblé-
matiques de l’œuvre de Kader Attia montr ent
sa capacité à développer des confrontations
saisissant le spectateur, l’électrisant face aux
contradictions politiques, culturelles et affec-
tives qui animent notre société. À travers un
vocabulaire souvent simple et efficace, l’artiste
opère des déplac ements qui ques tionnent
avec insolence les valeurs et l es comporte-
ments contemporains.
De manière fréquente, il adapte le principe du
choc propre à la création moderne afin de
pointer les tiraillements que les jeunes
Français d ’origine a rabe p euvent s ubir, à
l’image de son néon rouge sur fond noir dont
les mots “Mosquée” et “Night-Club” s’éclai-
rent en alternance (2005). Ce dispositif des
plus l isibles m ontre l ’indécision d es
Maghrébins issus de l’immigration, sommés
parfois de choisir entre la tradition coranique
et l’univers de la distraction. Cette dialectique
se retrouve dans
Hallal
(2004) où l e terme
religieux est employé non plus pour é voquer
la v iande c onsommée p ar l es Musulmans
fidèles aux rites cultuels mais une hypothé-
tique marque de vêtements
streetwear
qui
pourrait faire le bonheur des jeunes branchés
KADER ATTIA
Dans l e c adre de la huitième édition de la Biennal e d’art
contemporain de Lyon, Kader Attia a fait sensation en propo-
sant une installation stridente,
Flying rats
. Aux États-Unis,
cette appellation désigne les pigeons – considérés comme un
véritable fléau des grandes métropoles – qui se trouvent ici au
nombre de cent cinquante, dans une volière transformée pour
l’occasion en cour de récréation. Les oiseaux partagent leur
espace grillagé avec quarante-cinq figures d’enfants, grandeur
nature, portant perruques et habits pour c ette scène quoti-
dienne en apparence innocente. En apparence seulement. Car
la cohabitation entre les volatiles et les mannequins ne peut
que générer une tension quand on sait que ces derniers ont été
conçus à partir d’une matière céréalière nécessaire à l’alimen-
tation des granivores. Durant toute la durée de la manif esta-
tion, les pigeons picorent ainsi les membres de ces person-
nages voués à la décr épitude. Chaque coup de bec as séné
provoque en quelque sorte une blessure et installe un malaise
d’autant plus grand que les adultes aiment à imaginer l’espace
enfantin comme un espace préservé de toute violence.
Ce caractère traumatique est également sensible dans
Enfance
(2005) qui présente la même dimension ludique à tr avers un
toboggan rose et quelques poupées, prisonnières cette fois d’un
environnement hygiénique réalisé à partir de mir oirs au sol et
d’un carrelage blanc au mur. Dans c e milieu dis sonant, les
objets apparaissent alors doués d’une certaine perversité : le
jeu glissant laisse voir notamment en bas de la piste des pointes
saillantes qui présagent de la douleur si, parmégarde, on venait
Kader Attia.
Correspondance.
2003, photographie.
Galerie Kamel Mennour.
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