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artabsolument
)
no 3 • hiver 2003 page
69
lesquels paraissent les acteurs : tout semble également orchestrer
dans votre travail pour faire l’éloge de la mise en scène.
Djamel Tatah : Il y a quelque chose en effet qui relève de la
mise en scène mais cela n’a pas été posé au préalable. C’est
venu de façon progressive dans mon travail. Au début, j’ai cher-
ché à positionner mes figures dans le tableau, mais je n’avais
pas encore déterminé d’échelle. Je ne voulais faire ni de la
miniature, ni du monumental. C’est en portant mon regard sur
le travail de certains artistes comme Pistoletto ou Barnett
Newman que j’ai trouvé l’échelle qui me convenait. De la sorte
la figure à échelle 1 est toujours dans une relation directe au
monde. Les tableaux avec plusieurs figures représentent tou-
jours des figures seules les unes par rapport aux autres. Ce qui
les relie, c’est leur position devant le monde.
Philippe Piguet : Il y a quelque chose tout de même d’une certaine
théâtralité dans votre travail, dans la composition de vos tableaux.
L’usage que vous faites de la photographie en amont de la peinture
induit l’idée d’images posées.
Djamel Tatah : La théâtralité de mon travail vient tout d’abord
du fait que, dans une exposition, les tableaux sont accrochés
les uns par rapport aux autres et que le spectateur se trouve
ainsi inclus dans une mise en scène habitée de figures à
échelle humaine. Pour modèles, je prends en photo des gens
de mon entourage me constituant de la sorte comme une
banque de données dans laquelle je pioche selon mes besoins.
À partir de ces photos, j’élabore informatiquement la composi-
tion de mes tableaux. Je fais ensuite une sortie imprimante sur
transparent que je projette sur la toile pour obtenir une sorte
de bâti. Le décalage de temps entre la prise de vue et l’usage
que je fais des images contribue à créer un effet de distance,
accentué par leur traitement informatique. Que ces différentes
procédures induisent un sentiment de théâtralité, cela se peut
mais n’est pas de mon fait.
Philippe Piguet : Des figures anonymes et pourtant familières,
des visages fermés et pourtant expressifs, des attitudes neutrali-
sées et pourtant typées : tout semble orchestrer dans votre travail
pour faire l’éloge du paradoxe.
Djamel Tatah : C’est la question même de l’abstraction. Même
si mon travail est fondé sur le principe de la représentation,
mon intention n’est pas d’exprimer une “psychologie” de
l’homme mais un sentiment, et le sentiment est une abstrac-
tion. On pourrait dire d’une certaine façon que je fais une “figu-
ration abstraite”. Je ne veux pas que les modèles me
communiquent leurs sensations. C’est une forme de disparition
de leur être que j’enregistre. J’ai besoin qu’ils n’ouvrent pas la
bouche. L’image projetée n’a pas de sensation, c’est de la
mienne que je la charge. Je cherche l'expression abstraite
Chacune
des toiles :
Sans titre
2000
250 x 200 cm
Huile sur toile
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1...,9,10,11,12,13,14,15,16,17,18 20,21,22,23,24,25,26