Olivier Masmonteil, la peinture nécessaire
Entretien avec Philippe Piguet
Philippe Piguet
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Qu’est-ce qui motive le
choix que vous avez fait d’une peinture
exclusivement de paysage ?
Olivier Masmonteil
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Incontestablement, ce
sont mes origines. Je suis quelqu’un
de fondamentalement rural. Né dans
l’Aube, j’ai vécu jusqu’à l’âge de vingt
ans en Corrèze. Si je suis issu d’un
milieu bourgeois, c’est la ruralité qui
m’a constitué. La terre, le rythme des
saisons, la pêche, bref tout ce qui
appartient au monde de la campagne a
constitué mon quotidien. Sans que je le
mentalise particulièrement, le pay-
sage a toujours fait partie de moi.
PP
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Dans quelles conditions s’est-il
imposé comme une nécessité picturale?
OM
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Après avoir reçu un premier appren-
tissage de la peinture versant abstrait,
je me suis rendu compte très vite à
quel point cela n’était pas mon fait.
Quand je suis entré aux Beaux-Arts à
Bordeaux, je répétais lesmêmes gestes,
les mêmes matières, les mêmes
formes, aussi j’ai décidé de rompre
avec cela et le paysage est la première
chose qui est advenue. Je suis allé sur
le motif, j’y ai planté mon chevalet et
j’ai fait le paysage qui était en face de
moi. Cela a été le point de départ de
tout ce qui s’est passé par la suite.
PP
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Si on reprend les deux termes de
peinture et de paysage, est-ce que
>
Peinture
vous vous considérez pour autant comme un peintre
de paysage ?
OM
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Absolument pas. Le paysage s’est présenté tout
naturellement à moi et j’en ai tiré le fil comme si je
déroulais une pelote. Je ne sais où cela va m’amener.
Pour l’instant, même si parfois j’ai recours à des
intermédiaires comme la photo, voire la vidéo, et que
j’ai toutes sortes d’envies extrapicturales, la peinture
et le paysage me tirent par la manche et prennent le
dessus. Rien n’est moins sûr que cela perdure parce
que je reste ouvert à toutes les sollicitations plas-
tiques qui se présentent.
PP
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«La peinture n’est autre chose que la peinture, elle
n’exprime qu’elle-même. » Face à votre dernière série
de peintures, intitulée
Stiller Sturm
, je pensais à cette
formule de Manet tant il me semble en effet que, pour
vous, le paysage n’est qu’un prétexte. Sur fond de pay-
sage parfaitement identifié, vous y disposez au pre-
mier plan tout un jeu de lignes horizontales fortement
colorées qui subvertit le champ de l’image et instruit
un espace autre. À quoi cela correspond-il au juste?
OM
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Cette série a été quasiment faite sur un malen-
tendu. J’étais en train de travailler sur un paysage et
puis il y a eu une envie de ligne qui s’est imposée. J’ai
eu envie de traverser le tableau de part en part par
une ligne rouge. Dès que j’ai fait ce geste, tout un tas
de choses sont venues à la charge : l’idée d’écran et
de vitesse, celle de la perception du paysage vu d’un
train, celle du vieux débat entre abstraction et figura-
tion, celle de la distance et de l’écart existant entre
les plans, etc. Il y avait aussi un aspect méditatif à tra-
cer ces lignes et il régnait dans l’atelier comme un
moment de calme impressionnant. J’ai pris tout cela
en compte avec un immense bonheur.
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Par delà les effets de mode qui se targuent d’un retour à la peinture, il y a éminemment
un danger à se présenter sur la scène du monde de l’art contemporain en offrant à voir
des œuvres qui s’appuient sur la pratique exclusive du paysage. Depuis quelques
années, Olivier Masmonteil l’ose. Sans retenue aucune tant cela s’impose à lui comme
une nécessité. Figure émergente d’une génération qui affirme cette peinture nécessaire,
il s’explique sur son choix, entre raison d’être et projet d’œuvre.