| édito |
(
artabsolument
)
no 10 • automne 2004 page
9
Il n’est peut-être pas inutile – pour “saluer” ce numéro 10 –
d’expliciter de nouveau quelles sont les grandes lignes de la
revue que vous êtes de plus en plus nombreux à lire (merci
pour le bouche-à-oreille de tous ceux qui ont parlé de nous
avec suffisamment d’éloges pour que d’autres aient le désir
de la découvrir). D’une part, nous sommes indépendants –
grâce, tout d’abord, à vous et aux annonceurs qui nous font
confiance – ce qui facilite la liberté d’esprit; d’autre part nous
choisissons toujours ce qui nous parait déterminant pour
découvrir ou mieux comprendre ce qui constitue l’
œuvre
, les
effets qu’une œuvre d’hier ou d’aujourd’hui, historique ou
contemporaine, issue de la civilisation occidentale ou d’autres
civilisations procurent à celui qui la perçoit. C’est dire combien
l’art est pour nous à l’aune de ses capacités de sensation et
d’émotion, de résistance aux lieux communs et d’engagement
contre les “cauchemars de l’histoire”, de renouvellement de la
pensée et de la représentation, de rapport à soi et d’ouverture
à l’autre. C’est pour cela que nous privilégions toujours des
points de vue passionnés et accessibles d’artistes, d’écrivains,
de conservateurs ou de critiques d’art qui partagent avec nous
le désir de faire reconnaître ce qui ne leur semble pas exclu
que cela puisse perdurer. Qui partagent avec nous le désir de
montrer les liens pouvant exister entre l’art d’hier et d’aujour-
d’hui, entre l’art d’ici et d’ailleurs – leurs points communs,
leurs divergences, leurs continuités, leurs ruptures. Bref,
nous aimons l’art au point de croire en son universalité, c’est-
à-dire, plus précisément, au point de reconnaître dans une
œuvre
singulière
– ou une série d’œuvres, une période, un
mouvement, un style – une expression supplémentaire et défi-
nitive,
absolue
, de l’espèce humaine. C’est dire combien nous
sommes loin des inévitables aléas de la mode et du marché,
des clans, des chapelles, des communitarismes, des sempi-
ternels “copains d’abord”, ou du trop simpliste “il est normal
Lettre aux lecteurs
que l’on préfère sa famille à son voisin, son voisin à un étran-
ger”. C’est pour cela aussi, quel que soit le jugement esthé-
tique que l’on puisse en avoir, nous pensons – en toute
honnêteté – que les œuvres de chaque artiste d’aujourd’hui
présentées dans notre revue présentent un grand intérêt
(nous ne disons pas que tous les artistes intéressants sont
dans notre revue – ce qui demeure notre objectif – mais nous
affirmons que tous ceux qui y figurent le sont, de par leur
engagement ou l’unité de leur style, de par leur radicalité ou
leur novation – de par leur
substance
). Et en particulier les
artistes vivant en France et ce, bien évidemment, qu’ils soient
femme ou homme, et quels que soient leur origine, leur géné-
ration, leur esthétique ou leur médium de prédilection. Car,
bien que nous soyons entièrement convaincus de la qualité
artistique de Bill Viola, de Sigmar Polke, de Jannis Kounellis,
de Shirin Neshat ou de Anish Kapoor, il apparaît que les
artistes de ce pays ou ayant choisi de vivre dans ce pays n’ont
pas la reconnaissance nationale ou internationale qu’ilsméri-
teraient d’avoir. Il nous semble que trop d’acteurs dumilieu de
l’art, qui sont pourtant censés les défendre, dénient la capacité
de créer aux artistes vivant en France (à Paris ou en région).
Que trop d’artistes extrêmement intéressants sont considérés
comme secondaires alors qu’ils nous paraissent majeurs – en
devenir. Qu’il est urgent demontrer leursœuvres. Demieux les
faire connaître. De reconnaître ce qui est. De contribuer à
l’émergence et à l’approfondissement de tel ou tel aspect de
l’œuvre de ceux que nous considérons comme “incontour-
nables”, d’autant que Paris – la France – est devenue de nou-
veau prépondérante par la qualité de ses expositions et le
grand nombre d’artistes venus de tous les horizons qui y rési-
dent. C’est dire, enfin, combien, tel Bergson, nous n’avons pas
cessé de croire que “là où il y a des hommes et des femmes
capables d’admiration il y a civilisation”.
Pascal Amel et Teddy Tibi
Éditorial
Paris Expo – Porte de Versailles. Café des arts, le samedi 23 octobre de 18h00 à 19h00.
Animé par
PhilippePiguet
, critique d’art et commissaire
d’exposition, avec les artistes
Miguel Chevalier
,
Najia Mehadji
,
Yvan Salomone
et
Barthélémy Toguo
.
Le dessin
aujourd’hui
Fiac 2004
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