Page 8 - Aperçu AA 5 juin 2003

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page 28 (artabsolument ) no 5 • été 2003
Anne Dagbert : Vous avez souhaité vous expri-
mer sur “l’interdit” qui a pesé sur votre œuvre
dans les années soixante et pendant la
période du Pop Art, quand vous vous interdi-
siez le dessin, et sur “le retour au plaisir” qui a
accompagné ensuite votre pratique du dessin.
Hervé Télémaque : C’est une réflexion qui
m’est venue évidemment après coup. Il faut
replacer ce problème du dessin dans une his-
toire qui est celle de ma génération et de moi-
même “entrant en peinture”, celle d’un jeune
artiste qui fait ses études à New York en 1957-
1961 et qui se trouve confronté à la domination
de l’abstraction, l’expressionnisme abstrait
aux États-Unis, l’abstraction lyrique en France.
On se dégage des entraves de la figure et de la
représentation pour avoir une liberté totale
avec la couleur et il n’apparaissait pas néces-
saire de passer par le biais transitoire du des-
sin. Ça s’inscrivait aussi dans des tentatives de
découverte de l’inconscient ; on avait cette
ambition incroyable de croire, parce qu’on avait
en main un pinceau et de la couleur, qu’on
allait se découvrir d’emblée... Cette théorie
repose sur un a priori quasiment mystique !
J’admirais beaucoup Kandinsky à l’époque et
mes premiers tableaux reflètent cet intérêt. Je
dessinais à l’Art Student’s League, à New York,
demanière académiquemais quand je rentrais
dans mon atelier je peignais très librement
sans esquisses. C’était une approche naïve des
choses. Ce n’était pas à proprement parler un
interdit, car l’idée ne me traversait même pas.
Pendant lapériodepop, àParis (HervéTélémaque
quitte New York en 1961 pour s’installer en
France), la même problématique se poursuit
pour des raisons stratégiques différentes,
Ciel de lit
1963
Mine de plomb
Collection
particulière
Le peintre Hervé Télémaque s’exprime à propos de ses dessins, pratique qui l’a toujours
fascinémais qu’il a rarement mise en avant : pour (art absolument), il a voulu en dire davantage
sur les enjeux de cet “exercice intime”.
Note d’atelier
Hervé Télémaque, le dessin retrouvé
Entretien avec Anne Dagbert