Henri-FrançoisDebailleux
|
Il y a dans votre travail
une grande diversité de supports et de
matériaux. Qu’est ce qui vous pousse à
passer simultanément de l’un à l’autre?
Françoise Pétrovitch
|
Chaque matériau est
pour moi un outil et je choisis toujours
celui qui correspond le mieux à ce que
j’ai envie de dire. D’autre part, cela me
permet d’avoir une grande liberté et de
ne jamais m’ennuyer. Je trouverais
insupportable de refaire toujours la
même chose et le fait de changer de
matériaux crée une perturbation qui
m’oblige à me remettre constamment
en cause, à réfléchir différemment en
fonction de celui que j’utilise. En outre,
mélanger plusieurs médiums dans
une même exposition permet d’établir
entre eux des relations, de les faire
dialoguer, de proposer au spectateur
des allers et retours.
HFD
|
Le dessin à l’encre sur papier
semble toutefois être depuis toujours
au centre de votre travail…
FP
|
Le dessin est ce que j’ai su faire en
premier. Depuis l’enfance, j’ai toujours
dessiné et à l’âge de six ans, je disais
même que je voulais être dessinatrice !
Alors effectivement il est resté l’acti-
vité la plus importante et il est devenu
le moteur de toute ma démarche.
D’ailleurs même quand je fais de la
sculpture, c’est pour moi d’abord du
dessin. Et ce que j’aime avant tout avec
Françoise Pétrovitch ou les métaphores
de l’enfance
>
Dessin / Sculpture
le dessin, c’est la grande liberté et l’autonomie qu’il
me procure, c’est la possibilité qu’il me donne d’être
rapidement très près des choses observées, de pou-
voir les traduire spontanément. J’ai besoin de cette
légèreté et de cette immédiateté. Je ne fais en effet
jamais de croquis ou d’esquisses préparatoires. Je
travaille d’un seul jet et ensuite je garde ou je ne
garde pas ce que j’ai fait. Et comme je le disais précé-
demment il ne peut pas y avoir d’ennui, puisque je ne
recommence jamais deux fois la même chose. Le
lavis est en ce sens très intéressant parce qu’il se dif-
fuse de façon hasardeuse. Par capillarité, il y a des
formes qui se forment et se déforment, au moment
même où je suis en train de les faire. La couleur
avance et les formes se modifient là sous mes yeux,
par surprise, et c’est ce processus qui m’intéresse.
HFD
|
Parallèlement au papier, vous réalisez aussi
depuis peu temps de grands dessins directement sur
les murs…
FP
|
Il s’agit d’une confrontation plus physique avec le
dessin. J’aborde le mur comme si je prenais une
feuille, mais à la différence de celle-ci, je dessine en
bougeant, en avançant au fur et à mesure de mon trait.
Ce n’est donc ni le même espace, ni le même geste.
Cela me permet également de me demander où sont
les limites de ce déploiement d’un geste qui a un point
de départ et qui s’étire sans que je sache, à ce
moment-là, où sera sa fin. Ainsi je marche le long du
mur, j’y place des éléments que je découvre petit à
petit et que je perds de vue dès qu’ils sont dans mon
dos. Je les ai certes en mémoire, mais ce qui importe
alors avant tout c’est le présent du dessin, c’est la
nécessité de le continuer et la façon dont il va progres-
ser. C’est encore plus radical qu’avec le papier parce
que je ne peux pas le jeter : c’est un trait, un seul,
Entretien avec Henri-François Debailleux
Cette jeune artiste s’intéresse autant à l’imagerie de l’enfance qu’à la question insondable des liens entremémoire
individuelle et mémoire collective. Elle agit à la manière d’une “Alice” à la fois enchantée et désenchantée, une
Alice au pays de tous les jours. Son œuvre est essentiellement basée sur le dessin et les sculptures-installations.
>
1,2,3,4,5,6,7 9,10,11,12,13,14,15,16,17,18,...20