Art Absolument N° 89 - juillet/août 2019 - Aperçu - page 17

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DÉCOUVRIR
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Bernard Frize
Peinture, discours, méthode
Bernard Frize. Sans repentir
Centre Pompidou, Paris
Du 29 mai au 26 août 2019
Commissariat : Angela Lampe
PAR PHILIPPE PIGUET
Comment , en se promenant dans
l’exposition que le Centre Pompidou
consacre à Bernard Frize, ne pas se
souvenir de la célèbre formule de
Maurice Denis, produite en 1890 dans
Art
et Critique
: « Se rappeler qu’un tableau,
avant d’être un cheval de bataille, une
femme nue ou une quelconque anecdote,
est essentiellement une surface plane
recouverte de couleurs en un certain
ordre assemblées. » D’autant qu’à deux
ou trois exceptions près, l’artiste a balayé
toute idée d’anecdote comme prétexte à
peindre, sinon à faire de la peinture elle-
même le prétexte exclusif à la réalisation
de chacun de ses tableaux.
Tout est dit. Ou presque. Chez Frize, quand bien
même sa démarche repose sur l’application
d’un discours et d’une méthode, tout n’est en
fait jamais complètement bouclé. Le hasard
a toujours droit de cité. Mieux, il est attendu.
Comme l’accident. De sorte à obliger l’artiste,
au cas où, à composer avec ce qu’il n’avait pas
anticipé. Stratégie et paradoxe trouvent ainsi
chez lui les conditions d’une inédite conjugaison.
Et surtout, ces pendants offrent à la peinture la
possibilité d’une infinie variation, d’une sérialité
ouverte. C’est là l’une des premières qualités de
l’œuvre de Bernard Frize : un incroyable panel
de formulations qui sont chaque fois «ni tout à
fait la même, ni tout à fait une autre ». Pris à
son jeu – car la peinture en est un, et non des
moindres –, le regardeur ne peut s’ennuyer. Tout
y est pensé pour l’attirer dans les filets d’une
simple et unique question : comment c’est fait ?
La singularité de l’exposition du Centre
Pompidou est précisément de prévenir cette
interrogation. Ainsi, chacun des cartels des
œuvres exposées porte un commentaire très
précieux du peintre, agissant comme une voix
off, expliquant le pourquoi et le comment du tra-
vail. De la
Suite Segond
qui l’avait fait notamment
«Qu’est-ce que je peux faire avec un pinceau ?
dit Bernard Frize au détour d’un cartel – celui
de
Mailles
(2012). Jusqu’où ce pinceau va-t-il
me conduire et qu’est-ce qu’il va me permettre
de dire, d’exprimer de lui, de moi, de notre ren-
contre ? J’essaie toujours d’arriver à ce qu’il
n’y ait pas qu’une seule chose sur le tableau,
une seule chose montrée, mais qu’il y ait un
paradoxe, un antagonisme, une difficulté qui
soient à l’œuvre. Je crois que c’est plutôt ça :
j’essaie qu’il y ait une confrontation au travail
entre les choses. »
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