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mètres de long, est une traversée «depuis Lascaux»,
guidée par un fil d’or à la rencontre de Giacometti,
Pollock, … Ce déroulement s’interprète à l’aune de
la situation psychique et optique dans laquelle on
se trouve dans la grotte, à la fois statique et dans
l’ordre du flux. La sentence de saint Augustin –
« Celui qui se perd dans sa passion a moins perdu
que celui qui perd sa passion» – qu’il a inscrite dans
cette peinture exprime pleinement cette relation de
Gasiorowski avec la peinture, incarnée auparavant
dans un personnage, Kiga, créé en 1976, qui est la
peinture transférée sous la forme d’une Indienne
vivant dans une réserve et avec laquelle il se marie.
Dans le
Makemono
de 1986, un plus petit rouleau,
Lascaux se mue en signe : on y retrouve Gauguin
réinterprété avec la même mémoire que le dessin du
taureau de la grotte, par des repeints et des collages.
Alain Testard parle des peintures des grottes
comme pouvant être les figurations allusives à
des choses perçues, mais également comme des
signes abstraits ?
Je ne suis pas préhistorien, mais lorsqu’on regarde
les tracés runiques de Gavrinis et surtout Carnac, on
sent bien un rythme, porté par des condensations
et des allongements, comme dans les graffitis, mais
leur Pierre de rosette nous fait encore défaut.
L’intérêt pour les peintures pariétales de
Gasiorowski et A. R. Penck (dont les œuvres ont
été lors de l’exposition
Pariétal
en 2018 avec celles
de Dezeuze, Cabanes et Tal Coat) a-t-il à voir avec
l’idée que ces premières peintures contiennent en
creux toute la peinture à venir ?
Pour Gasiorowski, ce mouvement de la peinture
entraîne tous les signes possibles, en creux et en
virtualité. Chez Penck, cette idée a plus à voir avec
une fiction productive – car il savait qu’elle était
irréalisable – où il se situerait dans un espace pre-
mier. Et les peintures des grottes lui fournissent une
base, tout comme les pierres gravée d’Altamira en
Espagne ou de Mongolie Intérieure au nord de la
Chine, pour réinventer pour lui le geste premier du
peintre, et se placer potentiellement au début d’un
Damien Cabanes.
Rouleau Oies et chevaux
(détail).
2016, gouache sur papier.
Collection Gilles Fuchs.
Courtesy galerie Eric Dupont, Paris.