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PICASSO... D’APRÈS PICASSO !
PICASSO,
LE GRAND AUTOPHAGE
« Picasso aimait prendre des risques, il aimait chan-
ger les règles du jeu, eh bien nous avons décidé
de monter cette exposition comme une suite de
ses coups de dés », décrit l’enthousiaste Stanislas
Colodiet, co-commissaire de ce
Donner à voir
que
scandent quatorze moments de métamorphose.
De fait, l’exposition réalise un « rapport de grand
écart », celui recherché par Picasso pour créer la
« tension » nécessaire à exciter son imagination,
mais aussi celui entre une approche chronologique
et une vue elliptique, où se rappelle en permanence
la coexistence des options plastiques. À Montpellier,
qui ne connaît de Picasso qu’une seule preuve de
passage – maigre, il ne s’agit que de la facture d’un
hôtel pour une unique nuitée en 1926 –, ce parti pris
s’exalte par l’addition de vues d’œuvres contradic-
toires et fécondes, que les perspectives de la scéno-
graphie font naître à dessein.
«LESTYLEESTUNECAMISOLEDE FORCE»
En ouverture, la toile
Études
(1920) rappelle que la
geste picassienne ne supporte que de s’écrire au plu-
riel. Natures mortes au cubisme poussé jusqu’à son
synthétisme le plus schématique, profil ingresque
et mains bombées d’un classicisme récemment
S’IL NE S’EST PAS TOUJOURS VANTÉ D’AVOIR LAR-
GEMENT PUISÉ CHEZ LES AUTRES LES MOYENS DE
SA
MAESTRA
– « CANNIBALISME » QUE LA TRIPLE
EXPOSITION PARISIENNE
PICASSO ET LES MAÎTRES
EN 2008 A ACHEVÉ DE FAIRE RENTRER DANS LES
ESPRITS –, PICASSO S’EST EN TOUT CAS APPLIQUÉ LE
MÊME TRAITEMENT. S’AUTOCITANT ALLÈGREMENT,
L’ESPAGNOL REGARDE, DIGÈRE ET REMET SUR LE
TAPIS TOUTE TROUVAILLE CONFONDANT SONDÉSIR,
DEPUIS LE NATURALISME PATHÉTIQUE QUI ALLONGE
LES CORPS DE SA PÉRIODE BLEUE JUSQU’AUX
GRANDS
MOUSQUETAIRES
TARDIFS, OÙ IL REJOUE
L’ENFANCE ET BROSSE À LAHÂTE CE QUI LUI SEMBLE
ALORS ÊTRE UN PLUS VÉRITABLE « BORDEL D’AVI-
GNON». AUMUSÉE FABRE, CELUI QUI VOULAIT «TENIR
TOUS LES STYLES DANS UNE MÊME MAIN» VOIT SON
ŒUVRE DE PROTÉE SE CONJUGUER, DANS UNMÊME
ESPACE, AVEC UNE EXPOSITION EMBRASSANT PER-
MANENCES ET IMPERMANENCES DE L’ENSEMBLE DE
SA CARRIÈRE.
PAR TOM LAURENT
Arlequin musicien
.
1924, huile sur toile, 130 x 97,2 cm.
National Gallery of Art, Washington.
PICASSO. DONNER À VOIR
MUSÉE FABRE, MONTPELLIER
DU 15 JUIN AU 23 SEPTEMBRE 2018
COMMISSARIAT : MICHEL HILAIRE
ET STANISLAS COLODIET
