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en 2004 et qui est fondée sur une représentation
paisible du ciel étoilé la veille de grands bombar-
dements militaires…
Une série qui a fortement marqué les esprits au
point de vous y enfermer quelque peu. Comment
avez-vous réussi à en sortir ?
Alors que j’étais pensionnaire à la Villa Médicis et
que je cherchais à me défaire de cette image, je
me suis dit qu’après m’être baladé dans le passé,
il me fallait maintenant me balader dans le futur.
Le pouvoir de l’artiste, c’est de pouvoir se balader
dans le temps et non forcément avec des images.
J’ai alors créé une pièce faite de mille bougies,
installées au sol, composant une image du ciel tel
qu’il sera dans cent ans. Une image que personne
a priori ne pourra jamais voir. L’idée première de
cette installation repose sur une double question
PHILIPPE PIGUET |
Dès que vous êtes apparu sur la scène artistique,
vous avez articulé votre démarche autour de la problématique de la
vidéo-surveillance. À quoi tenait ce choix ?
RENAUDAUGUSTE-DORMEUIL |
Cela est advenu alors que j’étais encore
étudiant aux Beaux-Arts de Paris et que j’ai réalisé à quel point nous
étions placés sous vidéo-surveillance dans le quotidien de la ville. J’ai
alors engagé tout un travail de repérages et de plans d’installation
des caméras. Dès mes toutes premières expositions, je proposais aux
gens de tracer les itinéraires de leurs déplacements en y indiquant
l’emplacement des caméras sur leurs trajets. Par la suite s’en sont suivies
toutes sortes d’actions différentes qui ont notamment pris la forme de
courriers envoyés aux banques pour leur réclamer, au su de la loi sur la
protection de nos droits à l’image, les séquences filmées où je figurais.
Vous n’avez donc jamais pratiqué d’autres moyens d’expression
convenus comme la peinture, le dessin ou la photographie ?
J’y recours en fonction de la mise en forme de mon travail, comme par
exemple la photographie pour la série
The Day before
que j’ai réalisée
Des rapports entre texte et image, entre l’individuel et le col-
lectif, entre le visible et l’invisible, la démarche de Renaud
Auguste-Dormeuil est le lieu de toutes sortes d’expérimen-
tations plastiques qui interrogent le statut et la fonction de
l’œuvre ainsi que ceux de l’artiste. Les deux expositions
conjointes que lui consacrent le Musée d’art moderne et
contemporain (MAMAC) de Nice et l’Espace de l’Art Concret
de Mouans-Sartoux sont l’occasion d’une réflexion appuyée sur
la/les condition(s) de l’art. En un temps sans cesse bousculé par
une boulimie d’images qui brouillent tout à la fois l’adresse et
la réception de l’œuvre, rencontre avec un artiste qui a choisi
d’y adosser sa réflexion.
> ENTRETIEN AVEC PHILIPPE PIGUET
la question de l’œuvre
Renaud Auguste-Dormeuil. Si c’était à refaire
MAMAC, Nice. Du 27 janvier au 17 juin 2018
Commissariat : Hélène Guenin et Rébecca François
Renaud Auguste-Dormeuil. Don’t let me be misunderstood
Espace de l’Art Concret, Mouans-Sartoux
Du 27 janvier au 24 juin 2018
Commissariat : Alexandra Deslys et Claire Spada
RENAUD
AUGUSTE-DORMEUIL,