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            Zad Moultaka. ŠamaŠ – Soleil Noir Soleil
          
        
        
          Pavillon du Liban, Arsenal Nord
        
        
          (arrêt vaporetto Bacini), Venise
        
        
          Du 13 mai au 26 novembre 2017
        
        
          Commissariat : Emmanuel Daydé
        
        
          Pour sa troisième participation à la Biennale de Venise, le Liban recrée un
        
        
          temple du Soleil et de la Justice avec l’installation de Zad Moultaka,
        
        
          ŠamaŠ –
        
        
          Soleil Noir Soleil
        
        
          , dans l’ancien Arsenal militaire. Et la guerre et la paix
        
        
          sourdent dans l’œuvre de l’artiste, entre mur des lamentations, veau d’or,
        
        
          prières immémoriales et code interstellaire : Venise a trouvé son chaman.
        
        
          PAR MURIEL MAALOUF
        
        
          C’est une immersion visuelle et sonore
        
        
          à laquelle nous convie Zad Moultaka. Ce
        
        
          musicien confirmé – qui a déjà extrait
        
        
          la prière du
        
        
          
            Livre des morts tibétain
          
        
        
          d’un
        
        
          moteur de Ferrari avec sa pièce
        
        
          
            UM souve-
          
        
        
          
            rain moteur de toute chose
          
        
        
          et qui a confronté
        
        
          le zapateado sauvage d’une danseuse de
        
        
          flamenco au son de violents bombarde-
        
        
          ments avec
        
        
          
            NON
          
        
        
          , en hommage au journa-
        
        
          liste assassiné Samir Kassir – est aussi un
        
        
          plasticien remarquable – qui fait surgir des
        
        
          ombres visuelles et vocales dans le tunnel
        
        
          des Tuileries ou photographie des légumes
        
        
          dans la nuit comme autant de constellations
        
        
          sumériennes inconnues. Le voici qui accède
        
        
          à la Biennale de Venise, dans le saint des
        
        
          saints de l’art contemporain. Installée dans
        
        
          une Tesa, l’une de ces anciennes cales
        
        
          sèches de la Renaissance transformées
        
        
          en grands hangars industriels alignés dans
        
        
          l’Arsenal. Une œuvre où le son et l’image
        
        
          communient, enveloppent le visiteur.
        
        
          D’abord, c’est le noir où perce la voix, l’ins-
        
        
          trument musical par excellence. Trente-
        
        
          deux haut-parleurs placés au sol, le long
        
        
          des murs, correspondent à autant de chan-
        
        
          teurs : seize hommes et seize femmes se
        
        
          répondent en psalmodiant l’hymne au dieu
        
        
          du Soleil, en des chants venus des confins
        
        
          du temps, dans une langue inconnue ou
        
        
          oubliée, peut-être à l’origine du langage.
        
        
          Une lumière ténue se fait peu à peu et
        
        
          dévoile unmur brillant recouvert demilliers
        
        
          de piastres libanaises dorées, tentation de
        
        
          l’or, mosaïque byzantine, plan d’une ville
        
        
          en ruine… Et au milieu du hangar se dresse
        
        
          l’ombre d’un moteur de bombardier, objet
        
        
          phallique, métallique et glacé. Le chant spi-
        
        
          rituel se fait alors déflagration, grondement
        
        
          menaçant : raids aériens venus des souve-
        
        
          nirs d’enfance de l’artiste à Beyrouth (où il
        
        
          a grandi durant la guerre civile du Liban,
        
        
          avant de s’installer à Paris à l’âge de dix-
        
        
          sept ans) mais aussi combats persistants
        
        
          aujourd’hui dans unMoyen-Orient embrasé.
        
        
          Puis le chant s’éteint, le langage se meurt,
        
        
          devient balbutiement. Il faut réapprendre les
        
        
          mots… La prophétie surgit, salvatrice peut-
        
        
          être, apaisante sûrement, dans la voix d’une
        
        
          enfant qui parle à la place du dieu :
        
        
          «
        
        
          
            Puisse ce désastre être entièrement
          
        
        
          
            anéanti !
          
        
        
          murmure la petite voix.
        
        
          
            Comme la
          
        
        
          DE ZAD MOULTAKA
        
        
          LE PAVILLON D’OR ET DE NUIT
        
        
          DOSSIER
        
        
          
            VENISE
          
        
        
          Zad Moultaka.
        
        
          
            ŠamaŠ – Soleil Noir Soleil
          
        
        
          .
        
        
          2017, vue du chœur de l’Université antonine du Liban
        
        
          (direction : Toufic Maatouk). Pavillon du Liban, Venise.