Art Absolument 72 - Juillet/Août 2016 - Aperçu - page 8

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comment je pouvais répondre ici diffé-
remment en mélangeant mon travail avec
des œuvres historiques. Et plutôt que de
m’immiscer dans un parcours déjà existant,
j’ai préféré tout enlever et accrocher diffé-
remment en mettant au même niveau tous
les yeux de tous les personnages de la col-
lection. Dans une autre salle, j’ai regroupé
des tableaux qui ont beaucoup jauni en les
éclairant avec un néon en lumière orange.
La muséographie, les dispositifs et l’archi-
tecture d’une exposition sont des aspects
qui ont toujours nourri ma réflexion et que
j’ai toujours essayé d’investir.
Que voulez-vous démontrer avec cette
intervention?
Toute ma démarche repose sur le principe
du film, de la fiction. Et je peux très bien faire
des films avec d’autres moyens que ceux
du cinéma. Les expositions sont montées
comme des films, avec des séquences, des
fondus, des chapitres, des éclairages. Mon
premier geste est toujours celui de définir
un scénario, une narration, un contexte.
Je suis intéressé par le flou, l’entre-deux,
la suspension. Je n’aime pas trop définir,
trop annoncer les choses. Il y a des expo-
sitions dont on entend tellement parler
qu’on n’a plus envie d’aller les voir, ou qu’on
n’apprend rien de plus en y allant. J’ai au
contraire envie quemon travail puisse géné-
rer des expériences à vivre, à ressentir.
Pourquoi ce titre
Para Museum
pour votre
intervention à Ajaccio?
J’avais déjà conçu
Paralight
en 2004, une
installation lumineuse avec des flashs aléa-
toires place Saint-Sulpice et
Paracinéma
en 2005, un film à Cinecittà sur les décors
abandonnés. Je pense qu’aujourd’hui, un
artiste doit travailler avec l’appui des nou-
velles théories scientifiques qui changent
notre point de vue sur le monde. Il y avait
et il y a toujours les intuitions, la pratique
chamanique, il y amaintenant la théorie des
cordes, la physique quantique qui remettent
en cause le principe spatio-temporel dans
lequel on évolue. Ce qui m’intéresse, c’est de
se retrouver dans des espaces parallèles. À
Ajaccio, mon idée est de détourner lemusée
Fesch, de saisir la nature muséale pour la
retravailler, de créer un espace intermé-
diaire pour proposer une lecture parallèle,
une pratique paradoxale de l’exposition.
Comment avez-vous procédé?
Je suis parti de la collection que j’ai réac-
crochée en partie. Il s’agit d’une présen-
tation subjective, pas du tout scientifique,
avec l’idée maîtresse que ce sont les
tableaux qui semblent nous regarder.
Intervenir dans un musée et se fondre
dans les collections, c’est un peu la tarte à
la crème, c’est une invitation fréquente, à
laquelle on répond en jouant avec les codes
de l’histoire de l’art. Je me suis demandé
Vue de l’exposition
Portrait of a Young Man
, Bass Museum of Art, Miami, 2011.
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