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            Expositions
          
        
        
          
            L’Empire du sultan.
          
        
        
          
            Le monde ottoman dans l’art de la Renaissance
          
        
        
          Palais des Beaux-Arts, Bruxelles. Du 27 février au 31 mai 2015
        
        
          Commissariat : Dr. Guido Messling, Dr. Robert Born
        
        
          et  Michal Dziewulski (co-commissaire)
        
        
          Par Christine Buci-Glucksmann
        
        
          Vers une autre visionde laRenaissance
        
        
          «Venise en Orient »
        
        
          Ce déplacement du regard commence
        
        
          à Venise, cette ville où « l’œil d’Orient »
        
        
          est partout, de Saint-Marc bâtie sur le
        
        
          modèle de l’église des Saints-Apôtres de
        
        
          Constantinople au
        
        
          
            Fondaco dei Turchi
          
        
        
          , siège
        
        
          des marchands ottomans, sans oublier
        
        
          le rythme ornemental des palais et des
        
        
          façades avec leurs entrelacs et leurs arcs
        
        
          brisés. Et puis cette frontière aquatique
        
        
          et fluide comme à Istanbul, au point que
        
        
          Deborah Howard a pu écrire que Venise
        
        
          était «une ville d’Orient »
        
        
          1
        
        
          .
        
        
          1479 : la Sérénissime, fière de ses siècles
        
        
          d’échanges marchands, culturels et
        
        
          diplomatiques avec l’Orient, envoie
        
        
          Gentile Bellini comme ambassadeur à
        
        
          Constantinople sur la demande du sultan
        
        
          Mehmet II, désireux de s’ouvrir à l’Ouest et
        
        
          Dans le cadre du printemps 2015 consacré au regard de « l’autre », Bozar (Palais des
        
        
          Beaux-Arts de Bruxelles) organise une exposition internationale qui pourrait changer
        
        
          la vision classique de la Renaissance. Car si, en dépit des guerres, des rivalités, des
        
        
          peurs et des préjugés, l’Empire ottoman a bien partie liée avec la Renaissance, exer-
        
        
          çant une véritable fascination sur les artistes, de Venise à Nuremberg ou Cracovie
        
        
          (où l’exposition se tiendra ultérieurement), c’est bien parce que les échanges cultu-
        
        
          rels des XV
        
        
          e
        
        
          et XVI
        
        
          e
        
        
          siècles ont ouvert un nouveau chapitre dans l’histoire du regard
        
        
          entre l’Orient et l’Occident. Et même un « déplacement du regard », au sens d’Hans
        
        
          Belting, qui vous entraîne dans un véritable voyage artistique.
        
        
          Provenant des plus grands musées,
        
        
          160 pièces sont exposées : livres de
        
        
          costumes, de plantes, cartes et vues de
        
        
          Constantinople, manuscrits et objets
        
        
          scientifiques, tapis et tissus ottomans
        
        
          voisinent avec la peinture, abolissant les
        
        
          frontières traditionnelles entre l’art et l’art
        
        
          décoratif. Et ce jusqu’à l’hybridation des
        
        
          pratiques : dans tel plat d’Iznik, on peut
        
        
          apercevoir un jeune Italien perdu dans le
        
        
          décor, et dans un autre document donné
        
        
          par le sultan à Laurent de Médicis, une
        
        
          girafe tenue en laisse. Comme si l’es-
        
        
          thétique de la miniature rejoignait sou-
        
        
          dainement celle des grandes peintures
        
        
          de Bellini, Titien, Véronèse, Dürer ou
        
        
          Memling, avec leur splendeur, leur
        
        
          
            colorito
          
        
        
          et leur amour de la précision.
        
        
          L’Europe et l’Empiredu sultan