73
DOSSIER
DES PEINTRES AMÉRICAINS À PARIS
Entretien entre Émilie Ovaere-Corthay,
directrice de la Galerie Jean Fournier,
et Renaud Faroux
espace, mobilité, voyage
L’Amérique
Depuis les années 1950, la Galerie Jean Fournier n’a
cessé de présenter des peintres américains venus
s’installer en France. Si aujourd’hui le maître des lieux
n’est plus là – Jean Fournier est décédé en 2006 –, la
directrice actuelle, Émilie Ovaere-Corthay, ancienne
conservatrice dumusée Matisse du Cateau-Cambrésis,
continue de faire vivre son esprit iconoclaste et radi-
calement moderne. Elle revient sur l’implication de la
galerie pour une peinture « américaine-de-France ».
Renaud Faroux
|
Pouvez-vous expliquer la posi-
tion de la Galerie Jean Fournier dans son
rapport non conformiste au monde de l’art,
revenir sur les choix esthétiques depuis
les années 1950 qui se cristallisent par les
expositions d’artistes américains comme
Sam Francis, Riopelle, Joan Mitchell,
James Bishop, Shirley Jaffe…
Émilie Ovaere-Corthay
|
L’esthétique de la Galerie
Fournier est assez singulière parce
qu’elle prend ses racines dans les goûts
mêmes de Jean Fournier. Il a défendu très
tôt par exemple Simon Hantaï et, dans sa
suite, a ouvert sa galerie à des peintres
abstraits américains vivant en France
comme Riopelle, Joan Mitchell, Sam
Francis, Shirley Jaffe…, mais toujours en
ayant une préoccupation très prospec-
Édouard Boubat.
Jean Fournier à l’exposition Joan Mitchell en 1984.
tive des choses : pourquoi et comment
on regarde à un moment donné l’œuvre
d’un artiste, pourquoi il est intéressant
de regarder Sam Francis dans les années
1960, 70, 80… et toujours aujourd’hui.
C’est cette préoccupation-là que nous
essayons encore d’avoir. Je pense que
c’est pour cela qu’il est nécessaire de
continuer absolument de montrer chez
nous ce type de peinture abstraite. Ce
qui est certain, c’est que la galerie reste
avant tout le reflet des engagements per-
sonnels de Jean Fournier, bien plus que
celui d’une école ou d’un groupe. Par
exemple, Claude Viallat n’amena pas le
reste du groupe Support-Surface avec lui
et la peinture américaine montrée ici n’est
pas toute la peinture américaine !
de
Jean Fournier