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INTRODUCTION
J.L. •
Les trois commissaires ont porté sur le
pays un regard vaste qui inclut l’artisanat,
le design, l’architecture, la peinture, la pho-
tographie, la vidéo, les installations... Pour
cela nous avons fait appel à une scéno-
graphe remarquable, Clémence Farrell, qui
avait déjà réalisé la scénographie d’
Il était
une fois l’Orient-Express
et de l’exposition
sur le
Titanic
. En profondeur, cela rejoint
le combat que je mène depuis toujours,
notamment au ministère de la Culture, non
sans rencontrer parfois de vives réserves.
La France est le pays des cloisons. Dès les
années 1980, j’ai souhaité élargir le champ
de la culture, non pas pour tout confondre
ou tout mélanger comme le prétendent cer-
tains, mais parce que la création humaine
revêt des formes multiples. Or le Maroc est
un pays d’exception, et parmi ces excep-
tions il y a cette singularité de ne pas établir
de cloisons étanches entre l’histoire et le
présent ou entre l’artisanat et l’art. De ce
point de vue, le Maroc offre un modèle pas-
sionnant parce qu’il assume sa diversité.
Pascal Amel •
À ce propos, dans vos déclara-
tions, vous avez cité à plusieurs reprises le
préambule de la Constitution marocaine qui
précise que l’unité nationale est «forgée par
la convergence de ses composantes arabo-
islamique, amazighe et saharo-hassanie, [et]
s’est nourrie et enrichie de ses affluents afri-
cain, andalou, hébraïque et méditerranéen».
Outre faire découvrir la création moderne et
contemporaine du Maroc, cet événement
a-t-il une dimension politique – un message
que vous souhaitez faire passer?
J.L. •
Il n’y a pas deConstitution dans lemonde,
à part celle du Liban, qui soit le fruit de com-
promis entre les communautés. Ni une qui
ait l’audace d’écrire, dans son préambule,
la reconnaissance de la pluralité de ses
héritages culturels. Le cas du Maroc est
impressionnant ! Cela témoigne d’une luci-
dité, d’une intelligence politique, culturelle
et humaine très rares. Donc oui, je pense
sincèrement que cet hymne à la citoyenneté
s’adresse aux citoyensmarocainsmais aussi
aumonde entier, et en particulier à la société
française. Comme vous le savez, j’ai été très
lié à FrançoisMitterrand, que j’aimais et res-
pectais beaucoup. Il exprimait constamment
la même idée à propos de la France pour
combattre l’exclusion, le racisme, les secta-
rismes. Cet événement nous le plaçons sous
la protection morale de ce préambule, à tel
point que j’ai demandé qu’on affiche à l’entrée
de l’IMA une reproduction d’une partie de ce
texte en arabe, en berbère, en hébreu et en
français. En outre, le parcours de l’exposition
et l’ensemble de la programmation culturelle
(cinéma, danse, concerts, etc.) ainsi que les
colloques et les débats rendent comptent de
la diversité de ces héritages.
Simulation de la tente sahraouie sur le parvis de l’Institut du monde arabe.
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