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Entretien Avec Pascal Amel
José Alvarez
L’Œil de
Le scopique, le corps, l’écriture, ces trois thèmes s’entrelacent dans le choix
des œuvres électives de José Alvarez – amoureux des images et de la langue.
Éditeur d’art et écrivain, son dernier roman,
Avec la mort en tenue de bataille
,
paraissant ce mois de septembre aux éditions Albin Michel, nous plonge dans
la guerre civile espagnole de 1936.
PascalAmel |
Helmut Newton, dans ses
Grands
nus
de 1980, invente la photographie
comme genre non plus documentaire
mais «plastique», qui va devenir l’une des
aventures de l’œil les plus pertinentes de
notre époque. Le fait que ce soit scopique –
un nu féminin à la taille réelle – a-t-il
contribué à sa fortune critique?
José Alvarez |
Les
Grands nus
, sans complai-
sance aucune et en raison de leur taille –
inédite alors –, ont d’emblée suscité le
trouble auprès du public. Pourtant, c’est
à ce moment-là que Newton s’impose
comme l’un des principaux photographes
de l’époque bien qu’il rencontre de fortes
résistances d’un certain milieu artistique
du fait de son appartenance à l’univers de
la mode et, plus encore, de la représen-
tation qu’il donne de la femme, fortement
contestée par les mouvements féministes.
Ces réactions perdurent. Il faut du temps,
beaucoup de temps, pour que soit acceptée
toute proposition nouvelle et, plus encore,
celle doublement radicale que sont les
Grands nus
. Newton le savait mieux que qui-
conque : «Le contraste des opinions en ce
qui concerne mon travail est un état de fait
que je comprends très bien. J’ai commencé
par choquer le monde de la mode, qui
acceptait difficilement mes photos au début
des années 1960. Alors qu’aujourd’hui, rien
ne peut les choquer. » La reconnaissance
critique et muséale d’Helmut Newton
remonte au milieu des années 1990.
Helmut Newton.
Grand nu III.
1980, Paris, photographie, 220 x 95 cm.
Helmut Newton Estate.
Jean Degottex.
Wabi I.
1961, huile sur toile 235 x 130 cm.