Art Absolument N°75 - janvier / février 2017 - Aperçu - page 11

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Hartung et les peintres lyriques
FONDS HÉLÈNE ET ÉDOUARD LECLERC POUR LA CULTURE,
LANDERNEAU. DU 10 DÉCEMBRE 2016 AU 17 AVRIL 2017
Commissariat : Xavier Douroux
PAR RENAUD FAROUX
D’HANS HARTUNG
LES MÉTÉOROLOGIES LYRIQUES
À Landerneau, au Fonds pour la culture Hélène et Édouard Leclerc, l’exposition
réalisée par Xavier Douroux consacrée à Hans Hartung et à l’abstraction lyrique
est un véritable coup de tonnerre en pays breton ! Zébrures, giclures, griffures,
hachures, entailles, sillons, images de foudre et de roulements rappellent le
temps où « il pleuvait sans cesse sur Brest (…) une pluie de fer, de feu, d’acier, de
sang». Devant l’œuvre d’Hartung, nous sommes face au témoignage d’une huma-
nité à un degré zéro, ce qui fait de l’artiste un des éclaireurs majeurs des nou-
veaux chemins de la peinture ouverts comme à coups de convulsions rageuses.
Tempête graphique
Par Toutatis ! Il y a du magnétisme dans
l’air quand les pièces de Hartung conser-
vées dans sa Fondation d’Antibes déboulent
en Bretagne ! Pas étonnant quand on a en
mémoire un souvenir rapporté par son ami
le peintre Ladislas Kijno. Hartung lui avait
raconté qu’il avait été traumatisé enfant par
un soir d’orage sous un ciel zébré d’éclairs.
Sur un de ses cahiers d’écolier, il avait voulu
attraper au vol les éclairs dès qu’ils appa-
raissaient. Il fallait qu’il ait achevé de tracer
leurs zigzags sur la page avant que n’éclate
le tonnerre. Ainsi, il pensait conjurer la
foudre. Rien ne pouvait lui arriver si son
trait suivait la vitesse des éclairs qui lui ont
donné le sens de la vitesse du trait, l’envie de
saisir, par le crayon ou le pinceau, l’instan-
tané et lui ont fait connaître l’urgence de la
spontanéité ! À propos de son maître, Kijno
parlait aussi de sa soif d’astronomie, de sa
passion pour la photographie et le compa-
rait à Giorgione en convoquant la fameuse
zébrure jaune de la «Tempête» du musée
de l’Académie à Venise.
L’exposition développe de façon réussie ses
souvenirs «météorologiques » dans une
élégante initiative scénographique qui met
remarquablement en valeur une grande
vague de chefs-d’œuvre rigoureusement
choisis. Le long du parcours, à partir de
constructions de petites cellules, sont
présentés d’autres artistes, ce qui permet
d’éviter une confrontation directe avec les
tableaux et dessins de Hartung qui aurait
nui à la cohérence de l’ensemble et laisse
vibrer ainsi les différentes pièces présen-
tées. Ces chambres en îlots qui ponctuent la
traversée présentent des toiles impression-
nantes de Gérard Schneider, Simon Hantaï,
Fritz Winter, Jean Degottex, Cy Twombly,
Helen Frankenthaler, Sigmar Polke, Shirley
Jaffe, et Georges Mathieu qui a poussé la
science linéaire du maître dans une calli-
Hans Hartung.
T1963-R38.
1963, vinylique sur toile, 180 x 142 cm.
Fondation Hartung-Bergman, Antibes.
FONDS LECLERC
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