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            Dossier
          
        
        
          
            Le Maroc médiéval – un empire de l’Afrique à l’Espagne
          
        
        
          Musée du Louvre, Paris – Du 17 octobre 2014 au 19 janvier 2015
        
        
          Commissariat : Yannick Lintz, Bahija Simou, Claire Delery et Bulle Tuil-Leonetti
        
        
          Par Emmanuel Daydé
        
        
          l’empire à cheval
        
        
          Al-Aqsa,
        
        
          Véritable apogée de l’Occident islamique, les dynasties berbères almoravide,
        
        
          almohade et mérinide, toutes issues du Maroc médiéval, unifient un immense
        
        
          empire qui va de l’Andalousie à l’Afrique subsaharienne, entre le XI
        
        
          e
        
        
          et le XV
        
        
          e
        
        
          siècle.
        
        
          Portée par une volonté d’austérité et de réforme, la chevauchée fantastique de
        
        
          ces conquérants des sables et des montagnes exalte un art de la lumière, où la
        
        
          splendeur rencontre l’intelligence.
        
        
          S’il faut se représenterMontaigne à cheval, il
        
        
          faut faire de même pour le Maroc médiéval.
        
        
          Parce que c’est ainsi que les souverains de
        
        
          l’Occident islamique se déplacent autour de
        
        
          chez eux, auMaroc, plus loin auMaghreb, en
        
        
          Algérie, en Tunisie et en Libye, et en Europe,
        
        
          en Espagne et au Portugal, mais aussi parce
        
        
          que les conquérants almoravides et almo-
        
        
          hades ne se sentent nulle part mieux qu’à
        
        
          cheval. Parce que c’est là qu’ils trouvent
        
        
          leur équilibre, leur assiette et leur génie.
        
        
          Redoutables guerriers, les cavaliers almora-
        
        
          vides, le visage voilé, toujours enmouvement
        
        
          et toujours enarmes, n’ont pasmis finau rêve
        
        
          éveillé du califat omeyyade de Cordoue en
        
        
          surgissant des sables deMauritanie au beau
        
        
          milieu du XI
        
        
          e
        
        
          siècle. Pour la bonne et simple
        
        
          raison qu’à cette époque le dernier calife
        
        
          omeyyade est mort, et qu’al-Andalus, livré à
        
        
          la guerre civile, a été partagé enune vingtaine
        
        
          de
        
        
          
            taifas
          
        
        
          en 1031, dirigés par des
        
        
          
            reyes
          
        
        
          qui se
        
        
          donnent le titre pompeux d’émirs.
        
        
          Un empire pour
        
        
          un cheval almoravide
        
        
          Appelé par un chef de la tribu berbère des
        
        
          Sanhadja (« les chameliers », dont sont
        
        
          issus les Touaregs), soucieux de se mettre
        
        
          en conformité avec l’Islam, le prédicateur
        
        
          rigoriste Abdallah ibn Yassin dispense son
        
        
          enseignement porté par une volonté de
        
        
          réforme, depuis un couvent militaire situé
        
        
          sur l’île mythique de Tidra, en Mauritanie,
        
        
          au large du banc d’Arguin (à moins que ce
        
        
          ne soit à l’embouchure du fleuve Sénégal).
        
        
          Regroupant les tribus sahariennes occiden-
        
        
          tales en leur imposant une discipline de fer
        
        
          (d’où leur nom d’Almoravides,
        
        
          
            al-Murabitun
          
        
        
          en arabe, issu de la racine coranique
        
        
          
            r-b-t,
          
        
        
          inhérente au combat en rangs serrés),
        
        
          Yassin lance le
        
        
          
            djihad
          
        
        
          , la guerre sainte, au
        
        
          sud d’abord, contre l’empire du Ghana, puis
        
        
          au nord, contre Sijilmassa, la porte de l’or.
        
        
          Son successeur, Youssef ibn Tachfin, troi-
        
        
          sième émir et premier sultan de la dynas-
        
        
          tie, poursuit la chevauchée fantastique
        
        
          sur l’ensemble du Maroc et une partie de
        
        
          l’Algérie, jusqu’à ce qu’en 1074, les
        
        
          
            reyes
          
        
        
          
            de taifas
          
        
        
          l’appellent à l’aide de l’autre côté
        
        
          du détroit de Gibraltar. Après avoir battu les
        
        
          armées chrétiennes, et malgré les résis-
        
        
          tances à venir du Cid Campeador, Youssef
        
        
          et ses 15 000 guerriers almoravides ne font
        
        
          qu’une bouchée d’al-Andalus, l’actuel sud
        
        
          de l’Espagne et du Portugal, qu’ils intègrent
        
        
          au nouvel empire. Les Almoravides fondent
        
        
          Marrakech vers 1070 afin d’avoir un point
        
        
          L’ART AU MAROC