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16
(
artabsolument
)
no 11 • hiver 2005
L'Égypte interdite
«L'art moderne, pour l'histoire de l'art, s'est inspiré
de l'art océanien, beaucoup de l'art africain, et il n'y
aurait dans l'art contemporain pas de traces de l'art
égyptien, comme si c'était un interdit... ?» s'interro-
geait le peintre Catherine Viollet à son retour d'É-
gypte. La première réponse serait qu'à une forme
d'art formellement aussi élaborée que l'art égyptien
pendant trois mille ans et fermée sur elle-même en
un monde ni méditerranéen, ni véritablement afri-
cain, on ne puisse trouver prise pour une re-création.
En second, on pourrait penser que le XX
e
siècle,
ayant privilégié les signes plastiques de la destruc-
tion, préféré le fragment à l'unité et opté pour
l'éphémère contre la durée et lui tournant ainsi le
dos, ne porte pas ses affects vers cette construction
qu'élabore l'art égyptien…
La troisième raison serait un œdipe artistique où l’on
supposerait que l'art d'aujourd'hui, après avoir eu à
traiter par de multiples renaissances avec l'art grec
antique, aurait des difficultés à renouer avec le grand
ancêtre égyptien. J'ai été amusé de voir dernièrement à
la Fondation Beyeler de Bâle une armée de réparateurs
s'affairer à restaurer et à renforcer les dos des cinq
panneaux de la gigantesque toile d'Anselm Kiefer de
près de dix mètres de long représentant une monu-
mentale pyramide peinte avec un torchis de paille et de
terre titrée
Ton et mon Ancêtre et l'Ancêtre dumonde…
L'Égypte pèse-t-elle si lourd symboliquement?
L'Égypte imitée
On ne peut aborder une telle question sans la situer
dans la problématique de l'Influence, dont on sait
qu'elle est passée au XX
e
siècle de l'opération de
l'imitation à celle de l'interprétation, voire de la
transgression vis-à-vis de l'œuvremodèle, ici l'Égypte
ancienne. Sans oublier que ces influences sont sou-
vent mêlées et que l'Égypte à qui l'on voudrait redon-
ner sa place dans cette influence des arts primitifs
sur l'art moderne ne peut être qu'un élément parmi
d'autres. Ainsi que le disait Matisse, « toutes les écri-
tures plastiques : les Égyptiens hiératiques, les Grecs
raffinés, les Cambodgiens voluptueux, les produc-
tions des anciens Péruviens, les statuettes des
Nègres africains proportionnées selon les passions
qui les ont inspirées peuvent intéresser un artiste et
l'aider à développer sa personnalité».
Paul Gauguin.
Ta Matete (le marché).
1892, huile sur toile, 73 x 92 cm. Kunstmuseum, Bâle.
Portrait d’une dame.
Thèbes, Vallée des nobles,
tombe d’Ouserhat.
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