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ARTISTES /
ARTISTS
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ENTRETIEN AVEC /
INTERVIEW BY
DOMINIQUE BREBION
Née à Paris en 1985. Vit et travaille à Fort-de-France, Martinique.
EXPOSITIONS
2010
Souffle d’art
, villa Chanteclerc, Martinique
Flore Raisons Nouvelles
, exposition collective, fondation Clément, Martinique
SHIRLEY RUFIN
Dominique Brebion
|
Quel rôle joue la photographie dans
votre démarche?
ShirleyRufin
|
Dans ma démarche plastique, l’image pho-
tographique est une passerelle pour manipuler le
réel. Elle devient une perception unique, qui délivre
du sens à partir d’une image polysémique. Cela nous
renvoie inconsciemment à nous-même et permet
d’envisager un autre langage plastique.
Cela résulte d’un besoin de sublimer à partir de
défauts stéréotypés ce corps qui nous paraît anor-
mal, mais tout de même vu et vécu comme quelque
chose de sacré, et qui, si tôt dévoilé, se voit souillé.
Si l’on part du principe que la société façonne le
corps, un corps sans contexte social est donc ano-
nyme : il devient une pure utopie.
Ainsi, ma pratique fait état d’un processus de mise
en crise de la perception du corps par une action
chimique qui altère, défait, décompose, et détruit
l’image pour conduire à une perte du sujet.
DB
|
Comment construisez-vous vos images ?
SR
|
Je commence mon étude avec un outil proposant
un exact reflet reférentiel et une reproductibilité de
l’œuvre pour en faire à la fin un monotype. Je crée
des
Utopies photographiques
, des dépouilles for-
gées dans la déperdition de la lumière. À travers ce
processus, le corps devient l’empreinte de l’instant
photographique.
Par la manipulation de son image, il est transfiguré
et devient une métaphore que je nomme
Chimère
vaniteuse
.
Je ronge l’image de ce corps en la dépossédant de
sa surface, comme pour le marquer et l’authentifier
dans une singularité qui lui permet de passer de
l’ombre à la lumière.
Avant C
. 2009, photographie noir et blanc
avec traitements acides, 300 x 150 cm.