ARTISTES /
ARTISTS
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ENTRETIEN AVEC /
INTERVIEW BY
DOMINIQUE BREBION
STEEVE BAURAS
Dominique Brebion
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Pouvez-vous définir brièvement votre
démarche artistique et décrire votre insertion
professionnelle?
SteeveBauras
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Diplômé de l’Institut régional d’arts visuels
de Martinique (IRAVM) puis de l’École nationale
supérieure des beaux-arts de Paris (ENSBA), je
développe depuis quelques années ma pratique pho-
tographique ; celle-ci m’a amené à participer à des
expositions dont les thématiques se tournaient vers
l’histoire ou la sociologie de territoires aux fortes
particularités, tels que les camps de concentration
d’Auschwitz-Birkenau (en Pologne) ou les paysages
arides des villes du Chili. Depuis ma formation dans
un atelier de sculpture (atelier d’Emmanuel Saulnier,
ENSBA), mon travail peut être présenté sous forme
d’installations, d’objets. Ces installations-objets (la
série
Zugzwang
) sont des hypothèses que j’émets
autour du médium photographique et sa réalité de
monstration, ses limites et ses faiblesses.
DB
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Quel regard portez-vous sur le milieu des arts
visuels de la Caraïbe, dans l’archipel et dans la
diaspora?
SB
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Il y a visiblement une impulsion qui se met en
place grâce à certains acteurs économiques et artis-
tiques et qui permet de sensibiliser la population.
DB
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De votre point de vue, en quoi vous distinguez-
vous des générations précédentes ?
SB
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Certains pointeraient le déficit d’étendard iden-
titaire que renferme ma pratique, « situation que
je cultive ». J’ose espérer, à la vue de mon travail,
n’éveiller aucune sensation diasporique, identitaire,
chez le récepteur, tant ces notions me semblent peu
fructueuses. J’ai aussi l’impression que la nostalgie
d’un retour du déraciné fut ou demeure pour certains
une chimère persistante, se gardant par la même
occasion de pouvoir s’ouvrir à d’autres cultures. Le
statut d’étranger est véritablement une phase de
vie en société procurant de bons comme de mauvais
moments. À mon sens, c’est surtout l’opportunité
de vivre de façon intense la rencontre d’une culture,
d’individus, de paysages, donc d’un réel. L’essentiel
est de savoir d’où l’on vient et de n’avoir aucune
crainte de se perdre, ne ressentir aucune peur de
l’inconnu et par la même occasion du BARBARE.
Né en Martinique en 1982. Vit et travaille à Paris.
www.steevebauras.com
EXPOSITIONS
2009
Entre-Vues
, Photographie contemporaine caribéenne, fondation Clément, Martinique
Ci-contre :
Judenrampe
.
2006, photographie argentique,
Pologne, Auschwitz – Birkenau.
Dominique Brebion
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Could you give us a brief definition of your artistic approach
and describe how you fit into the artistic scene?
Steeve Bauras
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After graduating from the Institut régional d’arts visuels de
Martinique (IRAVM), and later from the École nationale supérieure des
beaux-arts de Paris (ENSBA), in the last few years I have been developing my
work in photography. This has led me to take part in exhibitions focused on
topics derived from the history or sociology of territories with powerful specific
features, such as the concentration camps of Auschwitz-Birkenau (in Poland)
and the arid landscapes surrounding cities in Chile. Since I was trained in a
sculpture workshop (the studio of Emmanuel Saulnier, ENSBA), I can now show
my work in the form of installations, as objects. These installation-objects
(the
Zugzwang
series) are hypotheses that I put forward regarding the medium
of photography and what it actually shows, its limits and its weaknesses.
DB
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How do you view the Caribbean plastic arts milieu both in the islands
and in the diaspora?
SB
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There is a definite impetus towards their development, thanks to cer-
tain economic and artistic players, which is raising the awareness of the
population.
DB
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From your standpoint, how do you differ from previous generations?
SB
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Some would point to the lack of an identity-based standard in my art,
a “cultivated situation.” I hope that seeing my work does not awaken any
sensations of diaspora or identity in the viewer, because those notions do
not seem very fruitful to me. I also have the impression that the nostalgia for
the return of the uprooted individual was and remains a persistent illusion
for some people, keeping them from being open to other cultures. The status
of the foreigner is truly of phase of life in society that brings with it both
good and bad moments. In my opinion, it is above all an opportunity to live
intensely the encounter with a culture, individuals and landscapes, and thus
with something real. The important thing is to know where you come from and
not be afraid of losing your way or be frightened in any way by the unknown,
and consequently of barbarity.