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ARTISTES /
ARTISTS
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CarlosGarridoCastellano
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How do you view the relation between the use, transit and
memory of the objects you use in your work?
AlexBurke
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In the early 1970s, I was tremendously impressed by the Bread and
Puppet Theatre, which staged huge, white puppets, and I made some of my
own from pieces of old sheets. I put them in pigeonholes formed by assembled
boxes sprayed with black paint. I was trying to convey my perception of a soci-
ety that ranks, orders and encloses in categories. My work went on to assume
other shapes, using other materials, arrays of goods and clothing. I became a
sort of archeologist digging in my personal and collective memory. I became
acquainted with the history of the Caribbean and the Americas. Recently, I
showed bookcases, in which I replaced the books with Katchina-type dolls,
each one tagged with an important date in the history of the Americas. In
another bookcase, I put closed linen bags with the dates embroidered on them.
It was intended as a reminder that our knowledge of this history is incomplete,
because many of the participants cultivated an oral tradition.
Né en Martinique en 1944. Vit et travaille à Paris.
www.aica-sc.net
EXPOSITIONS
2010
Mémoire des Amériques
, espace d’art contemporain Camille Lambert, Juvisy, France
Vous êtes ici
, fondation Clément, Le François, Martinique
ENTRETIEN AVEC /
INTERVIEW BY
CARLOS GARRIDO CASTELLANO
ALEX BURKE
CarlosGarridoCastellano
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Comment concevez-vous la relation
entre l’utilisation, le transit et la mémoire des objets
que vous utilisez dans votre œuvre?
AlexBurke
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Au début des années 1970, fortement impres-
sionné par une représentation du Bread and Puppet
Theatre qui mettait en scène d’immenses poupées
blanches, j’en ai fabriqué à l’aide de lambeaux de
draps usagés. Je les ai rangées dans des casiers, des
assemblages de boîtes passées à la bombe aérosol
noire. Il s’agissait de traduire ma perception d’une
société qui classe, range, enferme dans des catégo-
ries. Mon travail a ensuite revêtu d’autres formes,
intégré d’autres matériaux, des palettes de mar-
chandises, des vêtements. Je suis devenu une sorte
d’archéologue qui fouille ma mémoire personnelle
et collective. J’ai rencontré l’histoire de la Caraïbe,
des Amériques. Récemment, j’ai présenté des biblio-
thèques dans lesquelles j’ai remplacé les livres par
des poupées de type Katchina, chacune étiquetée
d’une date importante de l’histoire des Amériques ;
dans une autre bibliothèque, j’ai placé des sacs en lin
fermés sur lesquels les dates sont brodées. Il s’agis-
sait de rappeler que notre connaissance de cette
histoire est incomplète, car une part importante des
acteurs cultivait la tradition orale.
CGC
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Comment l’histoire générale de la Caraïbe
influe-t-elle dans votre travail ?
AB
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Mon histoire personnelle s’inscrit dans un pay-
sage, une région du monde, théâtre de l’élimination
de la population indigène, lieu d’accueil de migra-
tions successives avec des statuts différents : colons,
esclaves, Indiens des Indes, Chinois. Quand je me
retrouve à rassembler les morceaux du puzzle, les
fragments ténus, les traces illisibles, c’est toute
l’histoire de la Caraïbe et des Amériques qui s’invite.
Dans le monde d’aujourd’hui, celui de la délocali-
sation, de la recherche de la production au coût le
plus bas, c’est toujours le profit qui est privilégié au
détriment de l’humain. Les Caraïbes, les Amériques
ont été le laboratoire de ce monde-là.
CGC
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Pourquoi venir habiter en France et quel a été
l’impact sur votre travail ?
AB
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Habiter en France, c’est décider de mon lieu de
vie, prendre du recul. Le choix de la France s’est
imposé pour la langue et les commodités adminis-
tratives. J’ai souhaité, comme d’autres artistes avant
moi, me mettre en situation de rencontrer des créa-
teurs, des intellectuels venus d’autres géographies,
d’autres histoires, d’autres cultures, pour l’échange
et la confrontation, et peut-être également pour me
retrouver moi-même.
CGC
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How did the overall history of the Caribbean influence your work?
AB
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My personal history is part of a landscape, a region of the world that
was a stage for the elimination of the indigenous population and a place
that receive successive waves of migration with different statuses: colonists,
slaves, Indians from India, Chinese, etc. When I find myself putting together
the pieces of the puzzle, the fragments still available and the indecipherable
traces, I am encountering the whole history of the Caribbean and the Americas.
In today’s world of delocalization and the pursuit of low-price production,
profit is privileged at the expense of the human. The Caribbean and the
Americas were the experimental laboratory for that world.