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(
artabsolument
)
no 5 • été 2003 page
29
mais aboutissant au même effet. Chez la plu-
part de mes confrères, comme Monory ou
Rancillac, il n’y a quasiment pas de dessina-
teurs ; Rosenquist, qui aurait pu dessiner
somptueusement, ne le fait pas. Si l’abandon
de l’expressionnisme abstrait se pose pour des
raisons variées et que s’installe pour moi-
même et ma génération une certaine stratégie
pop, il en découle une technique où le dessin
n’a pas sa place. L’artiste pop abandonne la
peinture à l’huile et adopte la lanternemagique
qu’est l’épiscope. J’ai adopté cet instrument à
l’imitation de Fahlström ou de Lichtenstein
parce qu’il permettait de projeter une image
provenant de la photographie, des médias, de
la publicité ou de la bande dessinée, de lui don-
ner une importance choisie, comme peut le
faire un cinéaste. On ne mentionne pas assez
combien tout le Pop Art est dans une relation
de fascination avec le cinéma, celui de Godard
et d’autres ; nous employions les mêmes tech-
niques de coupure, cadrage, que l’on balançait
avec une grande liberté non réaliste... On peut
considérer tout le Pop Art comme du montage,
en opposition au mysticisme de l’abstraction.
Et tout ça rendait dérisoire les petits plaisirs du
dessin, du crayon, de la mine de plomb, etc.
Anne Dagbert : Il me semble que vous avez
toujours eu un rapport très fort avec le cinéma,
vu le nombre de titres de vos œuvres qui font
référence à des films précis.
Hervé Télémaque : Oui, en permanence.
Quand j’étais étudiant à New York, si j’avais
été plus audacieux et moins limité financière-
ment, j’aurais peut-être fait une école de
cinéma au lieu d’une école de peinture.
Anne Dagbert : Donc, à l’époque du Pop Art, le
fait de ne pas dessiner ne se posait pas en
termes d’interdit ou de censure ?
Hervé Télémaque : Non, ceci est une affaire per-
sonnelle, intérieure. Pourmoi, c’était une espèce
de purgatoire volontaire, de “couvent”, pour
reprendre un mot que j’ai souvent employé. Ça
ressemblerait quelque part à un acte d’amour
sans les plaisirs des préliminaires... On se prive
des premiers petits sketches, là où viennent les
premières sensations, de composi-
tion, de densité, de force, etc.
Anne Dagbert : Il y a eu quand
mêmequelquesexceptions, notam -
ment autour de la série des
Vénus
hottentote
. Si le dessin
Ciel de lit
,
de 1963, fait partie de l’imagerie
pop, représentant une sorte de
gaineet desoutien-gorge, formelle-
ment il est proche du dessin
Vénus
hottentote
de 1962, figure qui
manifestement a tenu une place
importante dans votre imaginaire.
Hervé Télémaque : J’ai découvert
un moulage de la
Vénus hottentote
Projet de porte
1970
Mine de plomb
34 x 27cm
Coll. H. T
Étude de gousse
1973
Techniques
mixtes
56 x 76cm
Coll. H. T
1,2,3,4,5,6,7,8 10,11,12,13,14,15,16,17,18,19,...20